L’origine du Château de Bonnes remonte aux premières défenses érigées par les évêques de Périgueux au IXe siècle pour protéger l’Abbaye de Brantôme fondée par Charlemagne, des remontées de la Dronne par les Vikings, qui passèrent tout de même et pillèrent l’abbaye par deux fois (en l’an 847 et 857). Il est à noter que la famille d’Aubeterre faisait remonter ses origines à un écuyer de Charlemagne.
L’actuel Château de Bonnes est édifié sur les fondations du château médiéval qui fut le siège seigneurial de la famille de Lambert, pendant six siècles, du XIe au XVIe siècle, tantôt dans le domaine du Roi de France, tantôt sous la couronne britannique.
Au premier abord on n’imagine pas qu’il fut un très grand et beau château, à l’histoire prestigieuse, ayant été un joyau des La Marthonie, des Pompadour et des d’Esparbès de Lussan d’Aubeterre, comtes de Bonnes, qu’il fut la demeure d’un proche de François Ier, d’un Maréchal de France, de célèbres Lieutenants Généraux du Roi.
Peu après la fin de la guerre de 100 Ans, une héritière des Lambert, Jeanne de Camblezac, épousa Robert de La Marthonie, et le château fut presqu’entièrement reconstruit dans le style Renaissance. Cette famille de La Marthonie, qui compta plusieurs personnages puissants du Royaume, a laissé des traces de leur pouvoir ainsi que des vestiges artistiques dans tout le bassin de la Dronne, dont le célèbre château de Puyguilhem, édifié par le frère de Robert de La Marthonie.
Ami de François 1er, Maître d’Hôtel du Roi, titre honorifique prestigieux, Gouverneur de Touraine, Robert de La Marthonie fit bâtir notamment, entre le châtelet médiéval et le corps de logis principal une galerie Renaissance à sept arcades en anse de panier soutenues par de fines colonnes ornées destinées à apporter de la fraîcheur l’été, un promenoir tel qu’on peut en voir dans les châteaux de la Loire, et fit décorer de peintures tout l’intérieur du château.
Il fait orner le mur médiéval côté église de belles fenêtres sculptées, qui répondent au portail Renaissance qu’il fait construire pour l’église. On peut encore lire dans deux macarons de ce rare portail du XVIe siècle, malgré les mutilations, les
initiales “RI”: “R” pour Robert de La Marthonie, le “1”, confondu à l’époque avec le « J », étant Jeanne de Camblezac, l’héritière de la seigneurie de Bonnes.
A l’époque, l’église aurait été reliée au château par un corps de bâtiment enjambant le chemin qui descend à la rivière.
Robert meurt assez jeune et ne voit sans doute pas l’achèvement des travaux qui sera l’œuvre de son fils Claude et de sa fille Marie.
En ce temps, les châteaux du Périgord sont rudes, construits sans fioritures. Cependant Robert de La Marthonie, ayant suivi la construction des châteaux du Val de Loire et gouverneur de Touraine donne à Bonnes une note Renaissance très raffinée.
Claude de La Marthonie fut apparemment sans descendance. Sa sœur Marie et le mari de celle-ci, Jean de Grignols, déjà propriétaire du fief de La Borie à Chalais, s’appauvrissent et vendent progressivement des terres, diminuant ainsi le domaine. C’est dès cette époque que, pour terminer les travaux de la galerie Renaissance, ils obstruent les arcades, dans lesquelles ils créent néanmoins des fenêtres de belle allure.
Les temps fastes reviennent pour le Château de Bonnes avec l’acquisition qui en est faite au XVIIe siècle par la famille de Pompadour, qui s’entend avec François d’Esparbès de Lussan, le fameux Maréchal d’Aubeterre, premier du nom (la famille comportera un deuxième Maréchal d’Aubeterre au XVIIIe siècle), pour conclure un mariage entre Marie de Pompadour, Demoiselle de Bonnes, avec François II d’Esparbès de Lussan. Ce dernier puis son fils Pierre, comte de Bonnes, d’Aubeterre et de Jonzac, furent Lieutenants Généraux des Armées du Roi, créèrent les Régiments Aubeterre-Infanterie et Aubeterre-Cavalerie, et participèrent à toutes les guerres contre l’Empire et les Habsbourg et l’Angleterre qui dessinèrent les frontières Nord et Est de la France.
Cette période redonne au château une seconde vie, prestigieuse, la façade est redessinée dans le style classique : la tour et le château ont les proportions du rectangle d’or. De belles cheminées peintes et de somptueuses boiseries y sont créées. Mais cela ne dure pas plus de 70 ans. La haute noblesse s’appauvrit et le château commence son déclin. En 1745 le château est extérieurement intact mais le domaine s’amoindrit.
La décadence est d’abord lente puis elle basculera brutalement à la Révolution.
Lorsque le château est mis en vente vers 1770, les visiteurs peuvent traverser 33 pièces, dont une salle de plus de 120 m². Il est hérissé de tours et de décors de toitures. Aujourd’hui, dans sa partie ancienne, il ne reste plus que 11 de ces pièces soit le tiers du château d’origine. Le domaine se compose alors encore de 6 domaines qui sont toujours aujourd’hui des exploitations agricoles.
A cela s’ajoute un moulin à grain, qui fut en fonction jusque dans les années 30 et un moulin à huile sur la Dronne en partie disparu. Les terres de bonne qualité ne représentent plus alors que 250 ha maximum ce qui était loin de pouvoir entretenir au château une vie brillante.
Le Château de Bonnes appartient après 1770 à une famille bourgeoise, les Périer de Gurat.
Jean-Baptiste Périer, bourgeois d’Angoulême possédant la terre noble de Gurat, près de Villebois-Lavalette, fut du parti girondin au début de la Révolution et fut élu Maire d’Angoulême. Par la suite il fut du fait de son action persécuté par les conventionnels et emprisonné. Son château de Bonnes, anciennement en Périgord, passé dans le département de la Charente lors de la création des départements en 1790, « qui possède – ainsi que le rapporte le document révolutionnaire – les plus beaux meubles armoriaux de la Charente », est saccagé et systématiquement mutilé. Libéré de prison après l’exécution de Robespierre, Périer de Gurat, gravement malade, fait vendre les restes du château et tous les terrains environnants ainsi que les fermes et moulins.
Puis il y a des partitions de l’édifice restant au gré des changements de propriétaires jusqu’au jour de 1859 où la partie centrale du château est reprise par la commune. La Commune de Bonnes transforme cette portion de bâtiment en école communale, mairie et logement de l’instituteur. Le salon d’Hercule sert de cuisine à l’instituteur et le salon de Caïn et Abel de salle de classe. Cette organisation perdure pendant 74 ans. Cette vente n’empêche pas l’usure mais a du moins le mérite de laisser debout ce qui reste de l’édifice et de laisser dans l’état dans lequel la commune les a trouvées les cheminées des salons.
A partir de 1950 un nouvel acquéreur, la famille Delmond, réunit lentement et patiemment les trois parties de ce qui reste du château : la partie centrale, la maison de village donnant vers l’église (construite en 1800 à la place du châtelet médiéval) et adossée à la galerie Renaissance, la tour et sa petite aile. Ainsi sont rassemblés les vestiges du Château de Bonnes, et les travaux de restauration sont depuis peu menés par ses descendants pour redonner une partie de son lustre à l’édifice.
Le Château de Bonnes est ouvert à la visite, généralement du 20 Juillet au 31 août. S’informer auprès de la Mairie, du château ou des Offices de Tourisme de St Aulaye et d’Aubeterre.